Saison 1.16 - L'université à Vannes dans les années 70-80


Interview Jean Le Nouvel 

Période de 1970 à 1985


Effectué le 27 mai 2014 à Vannes par André Lespagnol pour le projet HESRIB : Histoire de l’Enseignement Supérieur de la Recherche et de l’Innovation en Bretagne.

Les recherches d’Alann l’ont conduit à retrouver cette interview sous forme de vidéo dans les archives de son grand père. Une vidéo dont voici le contenu.

Quel a été votre parcours jusqu’à votre arrivée à Vannes ?

Je suis d’origine bretonne, dans les Côtes d’Armor, à côté de Quintin, partie non bretonnante et je suis allé faire mon service militaire au Québec. Auparavant, j’étais au lycée à Guingamp, ensuite à l’Université de Rennes, en mathématiques, ensuite à l’Université de Paris pour faire un DEA de Statistiques.

Pourquoi ce passage de Rennes à Paris ?

Il y avait l’ISUP à Paris et, à la fin, je suis parti à la coopération technique au ministère de la Santé du Québec comme statisticien pour faire des études d’épidémiologie dans la région du Québec près du Lac Saint Jean, à 200 kms au Nord du Québec. J’avais à étudier le fonctionnement des hôpitaux de cette région.

Aviez-vous des contacts avec l’université ?

Oui, un peu avec Laval. D’être dans un pays différent, c’était intéressant. On voit comment les pays fédéraux fonctionnent, toutes les responsabilités relèvent des provinces, et pour les français, c’était intéressant de voir des solutions différentes. 18 mois à Chicoutimi sur un projet de création d’une entité de médecine et je suis revenu 8 mois au delà du temps de service comme migrant reçu.

Et retour en Bretagne ?

Pour retrouver sa région il ne faut pas trop attendre et par l’intermédiaire du rectorat mon dossier a été envoyé sur un poste pour un professeur de Rennes 1 qui a proposé un poste d’assistant à Vannes en 1971, premier poste dans l’enseignement supérieur à Vannes. Nous étions très peu nombreux, nous étions ici 3 ou 4 pour 30 étudiants en première année en 1971.

Qu’est ce que c’est Vannes d’un point de vue universitaire à cette époque là ? quelle structure ? quel type de formation ?

L’IUT avait été créé sous la direction de monsieur Marcellin. Il avait ouvert un département APCE (Administration des Collectivités Publiques et des Entreprises) qui est devenu GEA (Gestion des Entreprises et des Administrations) en 1970 dans les locaux prêtés par la mairie de Vannes dans le centre ville. Le département était bien centré sur les besoins économiques en technicien supérieur des entreprises de la région Bretagne Sud. Il y avait une école de droit qui préexistait à Vannes, un institut municipal où il n’y avait pas de personnel universitaire permanent qui dépendait de Rennes 1. Un département statistique à l’époque ce n’était pas dans l’air du temps.

D’où vient cette idée de créer un département statistique à Vannes ?

D’un professeur de Rennes 1 qui a fait le dossier.

Le 2eme département a été créé juste après ?

L’année suivante.
ça a duré quelques années pour que l’IUT devienne autonome et avoir un directeur, il a fallu l’obtenir cette création, grâce à Jo Kerguéris. Il y a eu un accord entre Rennes 1 et Rennes 2. C’était plus facile, d’un point de vue administratif, de créer dans Rennes 1.
L’IUT est devenu un IUT de plein exercice, avec un conseil d’institut, un directeur nommé et Jo Kerguéris qui dirigeait le département ACPE et qui est devenu ensuite le président du conseil général du Morbihan.

En 1975, je crois, lorsque l’IUT est créé vous êtes deux départements ? Dans cette création de l’IUT, est ce qu’il y a des interactions avec les milieux économiques s’agissant de statistiques ?

Entre 1971 et 1975, c’était encore exploratoire et surtout la spécificité en statistiques dans l’université française, c’était la statistique mathématique qui prévalait. Faire des statistiques opérationnelles n’était pas très couru. A cette époque il n’y avait pas de moyen de calcul, même à Rennes 1 l’informatique n’existait pas encore, le centre de calcul est créé à ce moment là.
De 1972 à 1980, il a fallu survivre et chercher notre avenir pour l’institution et les enseignants chercheurs. Quand on avait des gens en informatique, c’était Rennes 1. Il y a eu un facteur déclenchant : j’étais au conseil d’institut au moment du rapport Nora Minc.
 (Wikipédia : Le rapport Nora-Minc est un rapport sur l’informatisation de la société, publié en décembre 1977 par Simon Nora et Alain Minc. Dans ce rapport sont inventés le mot et le concept de télématique et le lancement du réseau Minitel y est préfiguré. Il dénombre trois défis : télématique et nouvelle croissance; télématique et nouveaux jeux de pouvoirs; télématique et inépendance nationale. Et trois points d’appui : le pôle des télécommunications, l’Etat et les autres acteurs du jeu informatique, l’informatisation de l’administration)
En 1979, j’ai demandé, en conseil, de créer une commission informatique pour étudier les besoins propres de l’IUT. C’était aberrant de faire de la statistique sans moyen de calcul. On a obtenu du ministère le principe, avec l’aide du conseil régional et du conseil général, d’avoir des moyens de calcul, des ordinateurs. On voulait HP ou PDP, des ordinateurs américains, cela n’a pas été autorisé. On nous a obligé de choisir un Mini 6 de Honeywell Bull, qui était un ordinateur américain déguisé.
A partir de 1980-81 on a pu commencer à faire de l’informatique avec des moyens convenables. J’ai demandé au conseil l’étude de la création d’un département informatique. L’objectif était assez simple : les départements informatiques, nous en avions besoin dans les entreprises et les organisations, et la complémentarité entre l’informaticien et le statisticien apparaissait normale, c’était le moyen d’obtenir plus de moyens de calcul de cette façon là.

En 1985, on a créé le département informatique, des élus ont poussé. Christian Talgorn, qui était le directeur de l’IUT, était d’accord. Le département de gestion correspondait bien au besoins de la région. Ayant un département statistique très particulier, cela paraissait logique de lui fournir un département informatique qui pouvait aider.

Y a-t-il eu un appui des milieux économiques ?

A ce moment, l’informatique était une informatique de gestion et pas une informatique scientifique, et la gestion, c’était le Cobol. Une partie de nos étudiants, même statistique, avait été aspirée par la demande de techniciens en informatique et cela nous avait étonné, même le département statistique était aspiré. Le problème était de resserrer les compétences des deux types de département. Le département statistique n’avait pas une assise locale ni même régionale. Il n’y avait qu’un seul statisticien dans le Morbihan qui travaillait à la Direction de l’Agriculture. Assez rapidement nous nous sommes aperçus que notre département était d’une spécificité nationale, il fallait attendre que les choses évoluent. Les micro ordinateurs avec les réseaux sont arrivés, l’informatique est rentrée partout mais dans la statistique et l’informatique, cela ne visait que des entreprises très pointues. 

On a réussi à avoir un partenaire stratégique avec une entreprise américaine qui venait de s’implanter en France, que j’avais rencontrée à Deauville : SAS Institute. Le pari a été pour nous d’ouvrir la formation de nos étudiants à un outil qui avait de fortes relations avec les entreprises, les laboratoires pharmaceutiques, ici c’était Yves Rocher. On a eu le nez creux et cela nous a ouvert le champs de nos relations économiques.

Suite de l'interview dans l'article suivant 

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