Saison 1.21 - Le SIGP de France Telecom

 

Le SIGP de France Télécom


France Telecom était en pleine transformation dans les années 1990-2000. Avant d’écouter le récit du grand-père d’Alann, il faut rappeler quelques faits de l’époque, pour mieux comprendre le contexte bouillonnant dans lequel papy opéra sur le projet SIGP ( SI de Gestion et de Pilotage).
Pour répondre à une directive européenne et réorganiser le secteur des télécommunications français suivant le modèle existant aux États-Unis, la Direction générale des télécommunications, prend le nom de France Telecom le 1er janvier 1988.
La loi du 2 juillet 1990 transforme l'administration France Telecom en un établissement de droit public, dont Marcel Roulet est le premier Président.
Le 1er juillet 1992, France Telecom lance Itineris, le premier opérateur de téléphonie mobile à la norme de 2e génération GSM.
 
La création de la marque France Telecom donne le signal de l’ouverture du marché français à la concurrence : en 1992, c’est SFR (créée en 1988) qui ouvre en premier un réseau GSM concurrent et propose la téléphonie fixe avec le « 7 » de Cegetel. Puis, en 1994, c’est au tour de Bouygues Telecom de proposer son offre sur le marché des mobiles. 
 
En 1994, la France comptait 280 000 lignes mobiles soit 0,4% du réseau global, on en était au tout début ; en 1998, 11,2 millions de lignes mobiles et en 2000, 29,7 millions de lignes !! Une véritable explosion.

L’explosion du marché des mobiles en France permettra de développer des bases de données marketing géantes dès la fin des années 90. Celles-ci seront le terrain de jeu favori des projets data warehouse de l’époque. On en reparlera plus tard.

France Telecom devient également un fournisseur d’accès à Internet en 1995 avec la création de Wanadoo, deux ans après les premiers fournisseurs, et après avoir tenté d'empêcher l'arrivée d'internet en France. En septembre 1995, Michel Bon est nommé à la tête du groupe France Telecom. Pour préparer l'ouverture des Télécommunications à la concurrence au 1er janvier 1998, France Telecom passe du statut d'exploitant public à celui de société anonyme dont l'État français est le seul actionnaire, en juillet 1996.
En 1997, France Telecom ouvre son capital et est cotée sur les marchés boursiers de Paris et New York. En 2000, elle fait l’acquisition de l'opérateur mobile britannique Orange, au prix de 40 milliards d'euros, pour en faire une filiale nommée Orange SA.
Le nombre d'employés France Telecom est passé de 154 957 employés en 1998 à 100 054 employés en 2009.
Michel Bon, interviewé par l’Express en septembre 1996, répondait au journaliste :
- Où en est la réorganisation ?
- La phase active a commencé le 20 décembre 1995. Ce jour-là, j'avais réuni les 300 principaux cadres du groupe et informé l'ensemble du personnel en direct par vidéotransmission. La nouvelle structure s'est mise en place dès janvier 1996. Les 300 unités opérationnelles sont en cours de calage et de rodage.

- Votre réforme prévoit-elle l'autonomie comptable des unités ?

- Le 1er janvier 1997, chaque branche et chaque unité opérationnelle aura son budget et sa comptabilité propre. Le système n'est pas facile à mettre au point car les branches et les unités sont clientes les unes des autres. Ainsi, la branche " réseau " fournit les branches " grand public " et " entreprises " : il fallait établir des conventions comptables pour réguler leurs échanges. Si arbitraires que puissent paraître ces conventions, le nouveau système de comptabilité permettra de mesurer au fil du temps les progrès ou les retards des unités.

C’est dans ce contexte des années 90 et afin de se préparer à ce changement de statut, que France Telecom décide de se doter d’un outil de pilotage financier moderne, le SIGP (SI de Gestion et de Pilotage), s’appuyant sur les solutions BI. Le groupe fait alors appel à Tolosane pour mener l’étude de choix. 
Je suis en première ligne comme directeur de projet en assistance à maîtrise d’ouvrage auprès de la direction du contrôle de gestion du groupe, place d’Alleray, dans le 15e arrondissement à Paris. Je travaille pour le directeur de projet Didier, assisté de Malick comme chef de projet, et nous voilà partis pour un projet qui, dans sa première phase d’étude, durera presque un an. Didier portera toute la responsabilité du dossier et tous les risques aussi, liés à son envergure et à sa modernité : les logiciels BI, en 1990, étaient fort mal connus dans les grandes administrations françaises. Il s’agissait d’une vraie révolution que de vouloir s’appuyer sur ces technologies qui impliquaient un changement complet des usages et des pratiques pour des milliers d’utilisateurs cibles et la résistance au changement est inévitable. Malick assistera Didier avec toute sa compétence, sa disponibilité et sa bienveillance. Nous serons très complices sur cette mission et cette complicité fut très précieuse dans les moment difficiles.
Ce projet fera travailler tous les acteurs logiciels BI de la place de Paris. Les logiciels BI et surtout leur composante EIS (Executive Information System) correspondant à la partie tableau de bord et au moteur multi-dimensionnel.
La première phase consista à choisir la meilleure solution logiciel BI du moment répondant aux besoins exprimés par la direction du contrôle de gestion du groupe. Pour cela, l’équipe de direction travailla sur l’expression des besoins avec les utilisateurs pilotes pendant que j’étudiais les solutions BI du marché.
Je les connaissais bien car je baignais dans le milieu depuis quelques années. Après avoir fait une étude du marché et avoir retenu une première liste de logiciels, nous avons convenu, avec la direction de France Telecom, de comparer cinq logiciels réputés, à notre avis, comme étant les plus adaptés au sujet :
  • SAS de SAS Institute,
  • Express d’Information Resources International (IRI),
  • System W et One Up de Comshare,
  • Holos d’Holistics,
  • Pilot de Pilot Software.
Tolosane mit à disposition de France Telecom une plate-forme technologique dans ses locaux pour héberger les cinq éditeurs dans un milieu sécurisé pour chacun, à l’abri de toutes les indiscrétions et piratages de toute sorte. Chacun travailla avec ses propres équipes de consultants, les meilleurs qui soient, en un temps limité, à développer une maquette fonctionnelle dont nous avions écrit les spécifications et construit le jeu d’essai de données à introduire.
Dans la maquette étaient prévus des indicateurs de gestion intégrés dans des tableaux de bord parmi lesquels il était possible de naviguer selon un chemin prévu plus ou moins compliqué. Une fois les maquettes effectuées par les éditeurs, une évaluation fut faite de chaque réalisation selon une liste pondérée de critères élaborée avec la direction France Telecom afin de pouvoir lui attribuer une note. Cette liste permettait de mesurer toute une série d’informations : par exemple l’ergonomie et la lisibilité des écrans proposés, le mode de navigation d’un écran à l’autre, les fonctions de calcul, le paramétrage des indicateurs, la mise en place de filtres, l’affichage des tableaux, la navigation ascendante ou descendante, la gestion des couleurs, … On évalua aussi, en dehors de la maquette fonctionnelle, le langage de programmation des logiciels, la prise en main par des utilisateurs non informaticiens, la qualité de la documentation technique, la qualité de la hot-line des éditeurs, leur assise financière, leur offre de prix, leur implantation locale, l’existence de club utilisateurs, ...
Cette opération fut menée tambour battant, avec quelques tensions et manipulations de la part des éditeurs, le marché étant très prometteur et les enjeux importants. Je servais de tampon entre eux et la direction FT. Je reçu même, un jour, un manuel utilisateur sur la tête, envoyé par l’un des éditeurs, pour avoir émis des objections un peu trop appuyées concernant la qualité de son logiciel !
Il s’agissait d’équiper tous les contrôleurs de gestion du groupe (plus de mille) d’une nouvelle application disponible sur leur ordinateur portable, du niveau d’information le plus agrégé au niveau le plus détaillé pour leur usage avec la meilleure ergonomie du moment. Très belle vitrine pour l’heureux gagnant !
Très belle mission pour moi aussi, au milieu de ces cinq éditeurs nous offrant le meilleur d’eux-mêmes. Je fus en contact avec les consultants, les responsables commerciaux, les directeurs de chaque éditeur, pouvant mesurer toutes les dimensions d’un projet de cette envergure : dimension politique, humaine, technique, financière.
Jai pu aussi comparer les stratégies des différents partenaires selon leur organisation : certaines liées au modèle très anglo-saxon, d’autres très innovantes car portées par de toutes petites structures françaises très agiles, toutes influencées aussi par la personnalité de leur leader, directif ou pas, commercial ou technique, charismatique ou non.
Le verdict tomba en fin d’année, le 31 décembre. L’heureux élu fut IRI avec son logiciel Express. François Koukerdjinian, son directeur français, fut enchanté. France Telecom put ensuite lancer un appel d’offre de mise en oeuvre.
Valoris gagna le marché de mise en oeuvre quelques mois plus tard. Le SIGP doit encore exister à l’heure actuelle chez France Telecom, devenu Orange depuis quelques années …
Jeus l’occasion, grâce à cette mission, de travailler avec chacun des cinq logiciels étudiés, dans les projets qui suivirent chez Tolosane, pour d’autres clients, j’avais la chance de bien les connaître ... 
 

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